Située en Languedoc-Roussillon, aux confins de la mer Méditerranée, du Canal du Midi et du fleuve Hérault, Agde est une ville millénaire dont l'histoire, le développement et l'avenir restent étroitement liés à la mer qui la baigne.

L'emplacement

Le Mont Saint-Loup Il y a 750 000 ans, l'éruption d'un volcan de type strombolien entraîne la formation du Mont Saint-Loup, à l'extrémité de la chaîne des volcans d'Auvergne qui s'achève sur la rive méditerranéenne. Deux coulées de lave formeront le promontoire basaltique sur lequelle la ville d'Agde sera établie, à l'embouchure de l'Hérault. Une coulée est d'ailleurs visible sur le site de la plage de la Conque où le sable noir est constitué de débris basaltiques.

La plage de la Conque Pierre noire volcanique, lourde et dure, pauvre en silice, le basalte a longtemps été utilisé dans les constructions, notamment pour la cathédrale Saint-Étienne. Il est d'ailleurs présent dans la plupart des monuments et des édifices de la vieille ville, d'où le surnom ancien d'Agde lié à l'aspect sombre de ses bâtiments : «Perle noire de la Méditerranée».

L'origine de la Cité d'Agde

La disposition géographique de l'Hérault, qui en fait un lieu de passage très fréquenté, de même que l'accessibilité de la côte favorisent l'établissement de populations arrivées par la mer.

Au VIe siècle avant J.-C., des navigateurs grecs venus de Ionie, les Phocéens, établissent plusieurs colonies autour de la Méditerranée. Partis de Marseille, ils explorent l'embouchure du fleuve Hérault et sont conquis par la richesse du sol volcanique et la situation stratégique d'un lieu qui, entre un cap et les rives de l'Hérault, offre un mouillage abrité. À trois kilomètres en amont, sur une butte basaltique surplombant la rive gauche du fleuve, ils fondent un comptoir que le géographe grec Ptolémée baptisera «Agathé Tyché» («bonne fortune»).

L'Ephèbe, statue en bronze remontée du fleuve par la mission archéologique d'Agde D'abord limité à un simple comptoir de commerce entre Massalia (Marseille) et l'Espagne, le lieu s'organise et se développe grâce au commerce méditerranéen. Les navires y débarquent des cargaisons d'amphores en provenance de Grèce, de Marseille, d'Italie ou des régions ibériques et puniques. Le port fluvial se tient un peu en amont de la cité, au point de rupture de charge des gros bateaux de commerce. Des embarcations plus petites partent vers le nord en remontant le fleuve pour échanger marchandises et minerais de cuivre.

Agde est donc une étape importante de la présence grecque en Languedoc. Alors que l'empire romain ne fait que croître entre le IIe et le Ier siècle, la ville d'Agde conserve, à la conquête romaine, le statut de colonie massaliote grâce à l'alliance passée entre Rome et Marseille. Elle le gardera jusqu'en 49 avant J.-C., date de la chute de la ville phocéenne Massalia dans la guerre civile qui opposera César à Pompée. Agde passera alors sous le protectorat de Rome et sera rattachée à la Narbonnaise (Septimanie), province fondée en 118 avant l'ère chrétienne par le consul Cneus Domitius Ahenobarbus qui s'était emparé de tout le sud de la France actuelle.

Le moyen-âge et la cathédrale Saint-Étienne

L'histoire d'Agde est mouvementée : entre l'antiquité et le XVIe siècle, la ville sera plusieurs fois détruite et reconstruite, victime des guerres et des invasions. Elle connaîtra aussi la peste.

La cathédrale Saint-Étienne Au Ve siècle après J.-C., Agde devient le siège d'un évêché qui durera treize siècles, soit jusqu'à la Révolution.La cathédrale Saint-Étienne La population est placée sous la protection des évêques qui dirigent la cité. À la fin du XIIe siècle, l'Évêque d'Agde rachète les emprunts du vicomte de la ville et devient seigneur du Comté d'Agde, évêque comte de la ville. La fortification de l'église carolingienne construite au IXe siècle est entreprise en 1173. Trônant au coeur de la cité avec son immense façade en basalte, ses murs épais de 2 à 3 mètres, son donjon d'une hauteur de 35 mètres, ses créneaux et ses mâchicoulis, la cathédrale Saint-Étienne témoigne de la puissance des évêques d'Agde et évoque leur présence séculaire. Elle est un bel exemple d'église romane fortifiée.

Le projet de Richelieu et le Fort de Brescou

En 1629, le cardinal de Richelieu s'intéresse au site maritime du Cap d'Agde. Il imagine l'aménagement d'un grand port à l'abri du cap et la construction d'une jetée reliant la côte à l'îlot de Brescou. Sur cet îlot volcanique d'une superficie de 5000 m2 trône un fort à la position stratégique pour la défense des côtes agathoises. Le Cardinal souhaite donc installer une rade défensive en Méditerranée.

Les travaux de construction de la jetée devant relier Brescou à la côte commencent en 1632 suite à la décision prise par un arrêté du Conseil du Roi. La mort du Cardinal, le 4 décembre 1642, retarde les travaux déjà rendus difficiles par l'ensablement progressif du littoral et empêche l'aboutissement du projet, définitivement abandonné en 1651.

Le Fort de Brescou Le Fort de Brescou est tout ce qui subsiste de ce projet. Construit en 1586 par le Vicomte de Joyeuse (Guillaume de Joyeuse, 1520-1592), à l'époque des guerres de religion, pour éviter que le rocher ne servent aux protestants alors soutenus par l'Espagne, il sera agrandi en 1604-1605 puis en 1610. Le 1er octobre 1632, Louis XIII donnera ordre par lettres patentes de démolir les fortifications. Cependant, la démolition se fait lentement et cesse lorsque débutent les travaux liés au projet du cardinal de Richelieu.

Le fort sera finalement relevé de ses ruines et reconstruit en 1680, vraisemblablement d'après des plans de l'ingénieur militaire Vauban (1633-1707), dans le but de protéger l'entrée du port qui devait être construit à l'ouest du cap. Le port, prévu par Richelieu, ne sera finalement jamais construit et le Fort de Brescou perdra son intérêt sur le plan militaire. Il deviendra prison d'État au début du XVIIIe siècle. La prison sera définitivement fermée en 1851, mais l'île demeurera terrain militaire jusqu'en 1889. Le site sera alors déclassé et affecté aux Ponts et Chaussées. L'île est aujourd'hui propriété de la ville d'Agde.

Le projet du cardinal de Richelieu sera de nouveau d'actualité au vingtième siècle avec l'aménagement du Cap d'Agde au début des années soixante-dix.

Le Canal du Midi et l'écluse ronde d'Agde

L'ouverture du Canal du Midi contribuera fortement au développement du mouvement commercial et maritime d'Agde.

Le Canal du Midi En 1666, un édit royal autorise le Baron Pierre-Paul Riquet, ingénieur biterrois, à entreprendre la construction d'un canal maritime afin de relier l'océan Atlantique à la Méditerranée. Ce canal est destiné à dynamiser le commerce et le transport en facilitant et en sécurisant le transit des marchandises entre les deux mers sans avoir à contourner l'Espagne par le détroit de Gibraltar, un trajet de plus de 3000 km exposé aux dangers du piratage. Le passage direct vise aussi à priver d'une partie de ses ressources le Royaume d'Espagne qui contrôle le détroit et s'enrichit à chaque traversée, ainsi qu'à mettre en place un flux commercial à travers le Languedoc.

La construction du canal durera quinze ans et près de douze mille ouvriers participeront au chantier. De nombreux problèmes techniques devront être résolus, un système de capture d'eau élaboré sera créé, des ponts-canaux, des tunnels et des écluses seront mis en place.

Le canal sera inauguré au printemps 1681, après la mort de Riquet qui y aura consacré sa vie et sa fortune. D'abord appelé Canal Royal en Languedoc, il sera baptisé Canal du Midi en 1789 par les révolutionnaires. D'une longueur de deux cent quarante et un kilomètres, il relie Toulouse et la Garonne au port de Sète. Le transport de marchandises ayant pris fin dans les années soixante-dix, c'est aujourd'hui un canal à vocation touristique. Le Canal du Midi a par ailleurs été classé Patrimoine Mondial de l'UNESCO en 1996.

Écluse ronde d'Agde On retrouve une particularité à Agde : la seule écluse ronde du Canal du Midi. Construite en basalte, l'écluse dotée d'un bassin rond donne accès à trois niveaux différents : les bateaux y effectuent une rotation et empruntent l'un des trois sas qui conduisent soit vers Béziers (en direction de Toulouse), soit vers l'Étang de Thau par le fleuve Hérault, soit vers la cité d'Agde, via le Canalet qui assure depuis 300 ans la liaison du Canal du Midi avec l'Hérault. Cette écluse est le point d'accès à la voie fluviale qui relie la Méditerranée à l'Atlantique puisqu'elle permet aux bateaux venant de la mer de rejoindre le canal et inversement.

Si elle était autrefois parfaitement circulaire, l'écluse présente aujourd'hui un aspect différent. Elle a en effet été modifiée au cours des années soixante-dix dans le cadre de la mise au gabarit Freycinet (élongation des bassins).

Armoiries d'Agde En 1697, Agde enregistre ses armoiries définitives avec leur blason (3 bandes ondulées horizontales de couleur bleue sur fond jaune) : « D'or à trois fasces ondées d'azur », « à trois faces d'azur sur champs d'or ». Les trois faces bleues illustrent la mer, le fleuve et le canal, et les champs d'or représentent le sable.

De la Révolution au XXe siècle

Lors de la Révolution française (1789-1799), une insurrection éclate dans Agde et la ville perd son évêché. Monseigneur de Saint-Simon, qui dirige le diocèse et la ville depuis 1759, préservant les droits et prérogatives des évêques, seigneurs et comtes d'Agde, fuit la ville pour Paris où il sera guillotiné durant les derniers jours de la Terreur, le 26 juillet 1794. Agde jouera un rôle majeur dans le ravitaillement des armées françaises des Pyrénées-Orientales et d'Italie pendant la Révolution.

Le XVIIIe siècle marque l'apogée de la vocation maritime d'Agde. L'Hérault facilite le trafic maritime et l'activité commerciale liée au port apporte richesse à la ville qui se pare alors de nombreux monuments et de luxueux hôtels particuliers. Les Agathois travaillent comme mousses, marins, capitaines et font du cabotage en Méditerranée, entre l'Espagne, l'Italie et l'Afrique du Nord. La construction navale devient une activité majeure au cours du XIXème siècle. Dans les années 1860-1870 cependant, le tonnage des navires augmente et les bâtiments à vapeur délaissent Agde pour Sète. Le trafic du port décline.

La viticulture, importée par les Grecs mais beaucoup plus exploitée par les Romains, se développe au XVIIIe siècle et connaît alors de grands moments de prospérité. Au début du XXe siècle, les fortes récoltes fournies par le vignoble français auxquelles s'ajoutent, au grand mécontentement des vignerons, des vins importés et des vins artificiels produits en fraude, engendrent la crise de la mévente des vins. En 1907, les vignerons revendiquent le droit de vivre en travaillant de leur terre et exigent que la lutte contre la fraude soit mise à l'ordre du jour. Dimanche après dimanche, des manifestations pacifiques se tiennent sur les esplanades des villes du Languedoc-Roussillon pour atteindre, le 9 juin à Montpellier, le chiffre de 500 000 participants. Le Midi est occupé militairement. La plupart des dirigeants de la révolte sont emprisonnés et, les 19 et 20 juin, des fusillades font plusieurs morts à Narbonne. À la suite de ces incidents, le 17e régiment d'infanterie, basé à Agde, se mutine en soutien aux vignerons. Il sera par la suite expédié à Gafsa en Tunisie.

Pendant la Première Guerre mondiale, les Agathois combattent à la fois sur terre et sur mer. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, un camp de réfugiés est construit le long de la route de Sète pour recevoir les républicains espagnols fuyant leur pays après la chute de Barcelone, tombée aux mains des troupes franquistes. Le camp d'Agde devient ensuite, sous le régime de Vichy, un Centre de Rassemblement des Étrangers où séjourneront des réfugiés tchèques, belges, juifs ainsi que des Indochinois. Agde est occupée par les troupes allemandes à partir du 13 novembre 1942; le camp d'Agde est désaffecté peu après. Les Allemands fortifient la côte pour résister à un éventuel débarquement des Alliés. De jeunes Agathois participent aux différents mouvements de résistance. Les Allemands quittent la ville le 20 août 1944.

Jusqu'aux années 1950-1960, Agde vit de l'agriculture, de la pêche et d'un tourisme balnéaire familial.

Agde aujourd'hui

La cité d'Agde est la plus ancienne ville de France après Marseille. Née de la mer, elle garde de ses vingt-six siècles d'histoire un patrimoine archéologique et architectural qui témoigne de son riche passé.

Autrefois essentiellement fondée sur la pêche et la viticulture, la ville d'Agde vit aujourd'hui principalement de commerce et de tourisme. Elle compte plus de vingt mille habitants, mais on trouve dans ce haut lieu du tourisme international plus de lits touristiques que d'habitants à l'année.

Les quartiers d'Agde et le quartier de Rochelonge au Cap d'AgdeLes quartiers d'Agde et le quartier de Rochelonge au Cap d'Agde, carte agrandie Quatre quartiers composent la ville d'Agde : la Cité d'Agde elle-même, traversée par l'Hérault et le Canal du Midi; le Grau d'Agde et la Tamarissière, situés respectivement sur les rives gauche et droite de l'Hérault à son embouchure dans la Méditerranée, stations balnéaires typiques et traditionnelles offrant de nombreux campings; enfin, le Cap d'Agde, station balnéaire moderne très touristique en bord de mer avec son port de plaisance de plus de trois mille anneaux.

Le Cap d'Agde

Au début des années cinquante, le littoral agathois est constitué d'un cordon d'immenses plages de sable fin, appuyé sur un môle rocheux d'origine volcanique avec, en arrière-plan, une lagune plus ou moins marécageuse. Le site du Cap d'Agde est lui-même un marais, séparé de la mer par de larges plages de sable, au milieu desquelles s'avance le promontoire rocheux qui va donner son nom à la station. Seules quelques maisons bâties sur la côte sont présentes.

Trois siècles après Richelieu, l'État s'intéresse à l'aménagement du littoral quand, dans les années soixante, le gouvernement décide de développer le tourisme dans le Languedoc. Le Cap d'Agde sera ainsi créé dans le cadre d'une politique d'aménagement du littoral pour le développement des stations touristiques sur la côte méditerranéenne. Présidée par le conseiller d'État Pierre Racine, la Mission Inter-ministérielle d'Aménagement Touristique du Littoral Languedoc-Roussillon, dite Mission Racine, est en effet chargée de faire du Languedoc-Roussillon une région touristique et de diversifier son économie en offrant à une clientèle française et étrangère des vacances concurrentielles par rapport aux régions européennes voisines.

Le Cap d'Agde Les travaux débutent en 1969 avec l'aménagement du port de plaisance et le quartier du port Saint-Martin. Le développement se poursuit ensuite du côté est (le Môle, la Roquille, le village naturiste, les espaces verts de la Clape...) puis, en 1982, du côté ouest avec l'aménagement du quartier Richelieu. Des équipements de loisirs sont mis en place : Aqualand, le musée de l'Éphèbe, le golf international, l'Aquarium, l'Île des Loisirs avec cinéma, discothèques, casino... La dernière phase débute en 1990 autour du mail de Rochelongue.

Le Cap d'Agde Construit en amphithéâtre autour du port de plaisance central, le Cap d'Agde est une station balnéaire moderne capable d'accueillir des milliers de vacanciers. Quartiers calmes et quartiers animés y alternent et, avec ses quatorze kilomètres de plages de sable fin, il offre aux touristes une large palette d'activités dans un site enchanteur.

L'aménagement de la station du Cap d'Agde permet de diversifier l'économie locale tout en donnant un élan de modernité à la ville qui retrouve aussi sa vocation méditerranéenne.